Réflexions budgétaires de l'opinion publique en Roumanie (juin 2025) : priorités, dissonances et implications pour les politiques publiques

Le budget n'est pas qu'un tableau, mais une carte des espoirs et des frustrations collectives..
Lorsqu'on demande aux citoyens comment le budget public devrait être alloué, ils répondent non pas en tant qu'économistes, mais en tant que membres de communautés marquées par des expériences sélectives, une méfiance systémique et une mémoire sociale conflictuelle. Les résultats du Baromètre INFORMAT.ro - INSCOP de juin 2025, qui cartographie les préférences de la population en matière d'affectation des dépenses publiques, donnent une image faussement cohérente : l'éducation, la santé et l'agriculture sont les domaines d'investissement préférés, tandis que la politique étrangère, l'aide sociale et l'ordre public apparaissent comme des domaines symboliquement sacrifiés.
Mais derrière ces apparences de cohérence, il y a aussi le fait que les citoyens ne se sentent pas à l'aise avec l'affectation des dépenses publiques.
Mais derrière ces consensus apparents, une géographie beaucoup plus tendue se dessine : une société axiologiquement fragmentée dans laquelle la solidarité est négociable et les priorités budgétaires reflètent une compensation de la méfiance, et non un modèle de développement cohérent.
Ce texte propose une lecture socio-politique critique du sondage, en explorant :
L'enquête de la Commission européenne sur les sondages d'opinion et les enquêtes de la Commission européenne sur les sondages d'opinion.
- les contradictions entre les perceptions redistributives et l'imaginaire social de la performance institutionnelle;
- le rôle de l'éducation en tant que "budget métaphysique" de l'espoir pour l'avenir;
- et les fissures idéologiques qui traversent l'électorat, masquées par les scores majoritaires.
Les sondages ont été réalisés dans le cadre de l'enquête sur la santé.
Dans le même temps, la protection sociale révèle le succès de trois décennies d'exposition aux récits néolibéraux sur la relation entre l'économie de marché libérée des contraintes sociales et les causes de la pauvreté. C'est le domaine qui suscite le plus de rejet, puisqu'un quart des personnes interrogées, soit 25,4 %, réclament des coupes dans le budget de la protection sociale et que seulement 44,8 % souhaitent l'augmenter. Ce clivage indique une profonde érosion de la confiance du public dans la solidarité institutionnelle. Bien que la Roumanie connaisse des niveaux élevés de pauvreté et d'inégalité, les perceptions du public sont dominées par des récits d'abus, de parasitisme et de clientélisme. Cette situation est symptomatique d'une société qui a intériorisé une idéologie tronquée du mérite, où seules certaines catégories sont perçues comme "dignes" d'être protégées, tandis que d'autres sont exclues de la communauté morale.Retour à l'éducation : le budget métaphysique de l'éducation
Pour en revenir à l'éducation, lorsque 82,6% des Roumains déclarent vouloir plus d'argent pour l'éducation, ils n'expriment pas un consensus pédagogique ou une vision systémique. Il exprime un désir collectif de sortir de l'impasse, une projection symbolique de salut social en l'absence d'autres horizons crédibles. L'éducation fonctionne ici comme un budget métaphysique, comme un substitut au manque de confiance dans la redistribution, la justice ou la performance du marché.
Si l'éducation est la projection de l'espoir, l'ordre public est l'expression de la peur. Près de 44% des Roumains demandent une augmentation du budget de l'ordre public, tandis que 15,9% préféreraient une diminution. Dans ce contexte s'articule une géographie symbolique de l'insécurité, notamment urbaine et féminine, qui transforme les investissements dans la police et la gendarmerie en un rituel d'apaisement collectif.
C'est un budget de prévention imaginaire.
Une analyse catégorielle montre que les femmes et les personnes âgées sont plus susceptibles de soutenir une augmentation du budget consacré à l'ordre public, ce qui reflète non pas une idéologie autoritaire, mais une vulnérabilité perçue.
A l'inverse, les personnes âgées et les femmes sont plus susceptibles de soutenir une augmentation du budget consacré à l'ordre public.
En revanche, les jeunes, les utilisateurs de TikTok et les électeurs de l'USR/AUR sont plus réticents. Ils considèrent probablement les institutions chargées de l'application de la loi comme potentiellement abusives, comme une forme de contrôle ou de préservation du statu quo. Ainsi, le sondage configure une fracture silencieuse entre les générations et l'imaginaire de l'autorité, qui peut devenir politique dans des contextes de crise.
4. les budgets sacrifiés : l'aide sociale et la politique étrangère sous délégitimation.Le budget de la politique étrangère de juin 2025 est le fruit d'un travail de longue haleine.
Une société prise entre deux logiques opposées se laisse entrevoir derrière les scores en pourcentage : Les dépenses budgétaires sont donc un acte de jugement public : qui mérite d'être dépensé, qui est perçu comme utile, productif, voisin ?
Cette tension entre l'État désiré (réparateur, protecteur, efficace) et l'État réel (clientéliste, surveillant) génère une crise de l'imaginaire politique : les Roumains demandent "plus" sans vraiment croire qu'ils l'obtiendront. Et, peut-être pire, sans croire que tout le monde devrait l'obtenir.
Les Roumains demandent "plus" sans vraiment croire qu'ils l'obtiendront.
Post-scriptum : Que faire de ces données ?Pour un décideur politique ou un stratège gouvernemental, les données de ce sondage ne sont utiles que si elles sont interprétées de manière critique. Nous ne pouvons pas construire une politique sur des illusions de consensus. Ce qui ressemble à une liste de priorités est, en réalité, une carte de dissonances sociales et de conflits latents de légitimité.
La vraie question n'est pas " où voulons-nous augmenter le budget ? ", mais " qui d'autre sommes-nous prêts à inclure dans la communauté redistributive ? ". Tant que nous n'aurons pas répondu à cette question, tous les budgets resteront imaginaires.
Cristian Pîrvulescu
Cristian Pîrvulescu
Les budgets de l'Union européenne
A propos des données analyséesLa source de ces réflexions sur les budgets de l'Union européenne est la société civile.