Bruxelles, 13 novembre 2025 – La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a présenté en plénière au Parlement européen les trois options par lesquelles l'Union peut couvrir le besoin financier de l'Ukraine pour 2026-2027. La proposition ayant le plus grand impact politique – un prêt basé sur les actifs russes gelés – a généré les premières réactions divergentes parmi les eurodéputés.
Von der Leyen a averti que l'intensification des attaques russes contre l'infrastructure énergétique ukrainienne rend nécessaire une décision rapide. "En une seule journée, la Russie a lancé "plus de 40 missiles balistiques et de croisière et près de 500 drones", détruisant deux centrales majeures.
Pour couvrir le besoin financier de l'Ukraine pour la période 2026-2027, la Commission européenne propose, en premier lieu, d'utiliser le "headroom" restant dans le budget de l'UE. Par "headroom", on entend la marge financière disponible dans le budget pluriannuel de l'Union – c'est-à-dire la différence entre le plafond maximal de dépenses autorisé par les traités et les sommes déjà engagées. En d'autres termes, c'est un espace de manœuvre budgétaire qui peut être utilisé pour des situations imprévues ou pour des mesures urgentes. Cet espace budgétaire permettrait à l'Union d'attirer des fonds supplémentaires sur les marchés de capitaux par de nouveaux prêts communs, sur le modèle utilisé dans le cadre de NextGenerationEU. Selon l'exécutif européen, cette option garantirait un financement rapide et coordonné, sans demander de contributions immédiates supplémentaires de la part des États membres. Cependant, l'utilisation du "headroom" nécessite l'unanimité au Conseil, car elle affecte l'équilibre général du budget pluriannuel.
La deuxième option présentée est la création d'un accord intergouvernemental en dehors du cadre budgétaire de l'UE. Dans ce scénario, chaque État membre fournirait individuellement les sommes nécessaires pour contribuer au financement de l'Ukraine, selon une clé de répartition convenue. Ce modèle permettrait d'avancer le processus même en cas de blocages au Conseil, mais impliquerait des différences significatives entre les contributions nationales et le risque de créer un mécanisme fragmenté, plus difficile à gérer.
La troisième option, considérée par la Commission comme la plus efficace, est l'institution d'un "reparations loan" basé sur les liquidités provenant des actifs russes gelés dans l'UE. Cet instrument transférerait à l'Ukraine un prêt garanti par ces fonds, Kiev devant le rembourser uniquement si la Russie paie des réparations pour les dommages causés. La proposition déplacerait le coût de la guerre sur l'État agresseur et réduirait la pression sur les budgets nationaux, mais soulève des questions juridiques et nécessite un consensus politique solide au Conseil.
En plénière, Ursula von der Leyen a présenté l'option d'utiliser les actifs russes gelés comme la solution ayant le plus grand impact stratégique. "C'est le moyen le plus efficace de soutenir la défense et l'économie de l'Ukraine et le moyen le plus clair de faire comprendre à la Russie que le temps n'est pas de son côté", a déclaré la présidente de la Commission. Par cette formulation, l'exécutif européen soutient que l'instrument déplacerait le fardeau financier des contribuables européens vers la Fédération de Russie, réduisant la pression sur les budgets nationaux et envoyant un signal politique direct à Moscou.
Von der Leyen a également insisté sur l'urgence d'une décision politique. "Il est clair que nous allons livrer et que nous allons couvrir les besoins financiers de l'Ukraine au cours des deux prochaines années. La discussion porte maintenant sur le "comment", a-t-elle déclaré. Le message de la Commission est que le soutien à l'Ukraine n'est plus en discussion, mais seulement le mécanisme par lequel il sera structuré. Dans le contexte des désaccords entre les États membres, en particulier des réserves exprimées par la Belgique concernant l'utilisation des actifs gelés, cette déclaration met une pression explicite sur le Conseil pour éviter de nouveaux retards.
Un des principaux points controversés reste l'opposition de la Belgique à l'utilisation des actifs russes gelés pour financer l'Ukraine, plusieurs eurodéputés signalant en plénière que cette position a créé un blocage au Conseil. Les arguments avancés portent à la fois sur les risques juridiques et financiers, et les discussions techniques prolongées ont ralenti le calendrier de la décision. Les divergences entre les États membres se manifestent également en ce qui concerne les prêts communs : pour certaines capitales, la création d'un nouvel instrument similaire à celui utilisé pour NextGenerationEU risque de raviver des tensions politiques plus anciennes.
Dans le même temps, certaines formations politiques ont soulevé la question des répercussions juridiques internationales de l'option basée sur les actifs russes. Il existe la crainte que la Russie puisse contester devant les tribunaux internationaux tout mécanisme qui affecte ses biens gelés dans l'UE, ce qui pourrait exposer l'Union à des procès prolongés et à d'éventuelles contre-mesures. Ces préoccupations alimentent la prudence de certains États membres et compliquent la recherche rapide d'un consensus.
Les propositions de la présidente Von der Leyen ont été soutenues par les principaux groupes politiques européens, et le vice-président du PPE, Jeroen Lenaers, a critiqué le blocage du Conseil de la part de la Belgique qui a empêché le consensus européen concernant l'utilisation des actifs russes. Les Verts européens ont été plus sceptiques et par la voix du coprésident du groupe, Bas Eickhout, le groupe a demandé des clarifications : "Je pense que la question simple est la suivante : vous avez dit qu'il y a trois options sur la table. L'une est l'espace restant dans le budget actuel. Combien reste-t-il de disponible ? Vous dites que cela ne semble pas être beaucoup d'argent. La deuxième option, je ne la considère pas non plus très sérieuse. Alors, comment allez-vous débloquer le blocage créé par la Belgique en octobre, afin qu'il y ait un accord en décembre ?"
L'UE doit décider d'ici la fin de l'année du mécanisme financier pour 2026-2027, à un moment où la Russie intensifie les attaques, et l'Ukraine subit des pertes territoriales dans le Donbass. La Commission insiste sur le fait que l'utilisation des actifs russes gelés peut devenir l'instrument central de la réponse européenne.